Et si on passait de l’adolescence à l’adulterie ?

Note préalable : pour les habitués de ce blog, ne vous méprenez pas, ce n’est pas le taulier qui a écrit ce qui suit. Je pleurnichais que j’avais supprimé mon blog en janvier et qu’il me manquait, Skro m’a adorablement proposé de squatter chez lui. Je squatte donc le canapé. Et les hugs dans le frigo. J’abuse complètement ! Merci Skro !

Je suis désolée, je sais, JE SAIS !, que certaines lignes qui vont suivre vont heurter certaines personnes. Je m’en excuse par avance.

Mais il est vrai aussi que depuis le début de cette période agitée de confinement, et en fait dans les jours qui l’ont précédé déjà, certains comportements me heurtent et m’interrogent. Et il faut que j’en parle. Il faut que ça sorte. Pas pour juger mais pour essayer de comprendre. Je voudrais que les gens qui se reconnaîtront peut-être m’expliquent, dans le calme (et la bonne humeur si elle est là, parce que moi je suis en général de bonne humeur), et peut-être que j’arriverai à comprendre (ou pas).

Je sais aussi que je vais faire des généralités, que ça risque de crier au #NotAllMe (non il ne manque pas de « n » à la fin) et pareil je m’en excuse, mais si j’ai conscience qu’il y a une masse silencieuse qui ne dit rien, ne s’inscrit pas dans le même mouvement, le fait est qu’elle se tait et que ce n’est pas elle qu’on voit s’exprimer sur les réseaux sociaux, notamment mais pas seulement, et donc pas elle qui risque de me heurter. Ou de s’inscrire en faux avec ceux qui tempêtent, qui hurlent, qui crient.

Et le fait est que depuis le début de tout ça, l’une des choses qui me heurtent le plus c’est cette masse de gens qui semblent taper des pieds, se rouler par terre, piquer une crise, mais qui ne se prennent pas tellement en main. Ceux qui sont passifs et attentistes au lieu d’essayer d’inventer ou de réinventer, d’innover, d’essayer de faire autrement, de proposer des solutions. Ceux qui me donnent l’impression de voir des ados passant leur temps à trouver leur parents nuls et à les insulter mais qui attendent que ceux ci lui lavent son linge et lui disent précisément où placer sa chaise face à son bureau parce qu’il n’est pas capable de le décider seul.

Je suis, un peu, effarée de voir certaines attentes qui pèsent sur les dirigeants (d’autres sont légitimes, c’est le boulot de l’Etat de trouver des masques hein), l’absence totale de compréhension sur la nécessité de prioriser dans la crise (et que ces priorités évoluent), l’incapacité à entendre qu’on ne sait pas tout de ce virus (et même qu’en fait on n’en sait quasiment rien à l’heure actuelle) et que donc oui les consignes évoluent du jour au lendemain. Je suis très inquiète de voir les gens demander une direction claire et stable … comme si on savait où on allait. Parce que la vérité c’est qu’on ne sait pas. Nos décideurs pas plus que nous. On avance. On tâtonne. On bricole. Personne ne peut prédire la situation à 6 mois. Même pas à une semaine. D’ailleurs j’aurais tendance à me méfier de ces prophètes plein de certitudes, autant ceux promettant l’apocalypse que ceux promettant un retour à la normale …

Je suis d’autant plus heurtée je crois, que pour ceux qui ne me connaîtraient pas ou n’auraient pas tout suivi, je travaille en milieu hospitalier. Qu’il y a 7, 6 et 5 semaines en arrière, on fracassait nos façons de faire, nos organisations, nos petites habitudes. Que ça a été aussi brutal et violent que pour tout le monde. Qu’on s’est préparé à des choses horribles que vous n’imaginez même pas, qu’on a fait le tour des bureaux qu’on pourrait transformer en chambres pour mettre un patient si besoin, qu’on testait certaines salles pour savoir si on pourrait les mettre en pression négative pour les changer en salles de réanimation improvisées. On n’en a pas eu besoin, ou pas encore, mais on a imaginé, inventé, proposé. Aujourd’hui encore on est en train de réinventer notre façon de faire pour continuer à nous occuper des patients Covid et des autres. On n’a pas attendu que le ministère de la Santé et les ARS nous le demandent, qu’ils nous donnent les directives, qu’ils nous expliquent combien de mètres carrés il fallait pour une salle de réa et combien de respirateurs on pouvait mettre au mètre carré.
Peut-être que c’est plus facile parce que chaque hôpital a une direction, qu’on a une forme d’autonomie décentralisée ? Peut-être parce qu’on savait que vu l’urgence de la situation on nous passerait tout et/ou qu’on pouvait tout se permettre ? Peut-être parce qu’on n’avait pas le choix ? Qu’on ne pouvait pas dire « non on ne veut pas ».

Attention, comprenons nous bien, je ne dis pas que la période actuelle n’est pas terriblement difficile et stressante. Et je ne dis pas que ça a été facile au départ pour nous. Qu’on a pas eu la boule au ventre et les larmes aux yeux. Mais être dans quelque chose de concret et de constructif ça nous a aidé. Ça nous aide. Ça nous donne de la stabilité là où il n’y en a plus, là où il n’y en aura plus avant un moment. Parce qu’à 5 semaines depuis le début du confinement il est vraiment temps d’accepter qu’on ne récupérera pas nos vies d’avant en claquant des doigts non ? Et de réfléchir à comment on va faire peut-être ? Comment on va changer nos habitudes, s’adapter ? En sachant que tout est mouvant, que la situation évolue constamment, que la vérité d’un jour ne l’est plus le lendemain.

Je crois, vraiment qu’il est temps d’arrêter d’attendre des autres qu’ils nous prennent par la main mais peut-être que j’ai tort ?
Je crois aussi qu’il est vraiment temps d’admettre qu’on a la trouille, très fort, une trouille qu’on ne maîtrise pas, au lieu de demander aux autres de nous donner ce qu’ils ne possèdent pas : la capacité de nous rassurer à 100%.